Nightwish - Yesterwynde

Quatre ans après un "Human II Nature" qui avait laissé un goût amer dans la bouche de bien des fans, les Finlandais de Nightwish sont enfin de retour avec un dixième album aussi attendu que craint. Réussiront-ils à retrouver la ferveur d'une fanbase déclinante, à une époque où le metal sympho est un genre très présent ? Ou au contraire finiront-ils de s'enterrer pour devenir l'archétype du "vieux" groupe dont on se moque des nouveaux albums pour toujours écouter les premiers ?

 

Pour un fan, il n'y a rien de plus pénible que de ne pas réussir à accrocher à une nouvelle offrande de son groupe favori. Mais là pour le coup, j'étais préparé. Jusqu'à "Once" il y a déjà 20 ans, Nightwish ne faisait que se perfectionner. Peaufinant une recette jusqu'à obtenir l'album ultime du genre. Ensuite, difficile de faire mieux, rester au même niveau était déjà une gageure compliquée. "Dark Passion Play" était pourtant une franche réussite, d'un point de vue musicale. Le recrutement d'Anette Olzon en lieu et place de Tarja Turunen restera à jamais un mystère (non pas qu'elle soit mauvaise, dans ses autres projets elle assure, mais ici, elle ne semblait pas à sa place) d'un point de vue vocal, mais les compos étaient excellentes. "Imaginaerum" proposait un léger renouvellement du style, dans la continuité. Dépaysé mais pas trop. Et puis on a encore eu un changement de vocaliste, ce qui n'est pas très bon signe.

 

Bien que l'arrivée de Floor Jansen fut salvatrice, (tout le monde aimait son précédent groupe After Forever, ou au minimum ses performances vocales et scéniques), elles cristallisaient néanmoins le gros soucis de communication au sein du groupe. Il semble plus que clair que Tuomas est tyrannique au sein du groupe, créant une ambiance malsaine, peu propice à l'alchimie entre les membres. Le récent départ de Marco en est encore une belle démonstration. Il ne reste plus que Tuomas et Emppu du line up original. "Endless Forms Most Beautiful" était donc un peu le "Star Wars Episode VII" de Nightwish. Piochant dans le meilleur des 3 albums précédents, légèrement remanié pour offrir un album le plus conventionnel possible. C'était ultra efficace, certains morceaux vraiment bons, mais sur les 3/4 du disque, la solide impression de "déjà entendu" gâchait l'ensemble, l'empêchant de devenir un classique du groupe, mais plus un album fait pour rassurer après la période Anette. Hélas, ce n'était pas le seul défaut du groupe. Floor a une voix incroyable et Tuomas ne l'a presque pas exploitée. Se contentant de lui faire chanter des lignes convenues, sans jamais pousser sa voix. Un peu comme si ça l'emmerdait de reprendre une chanteuse lyrique avec Anette, qu'il avait cédé aux fans mais n'en voulait pas.

 

Soit, mais alors l'album suivant "Human II Nature" n'arrange rien. "Endles Forms..." était au moins efficace. Celui ci était carrément chiant. L'aspect orchestral a disparu, pour nous proposer un album assez mou, avec heureusement quelques passages brillants nous rappelant le Nightwish d'antan de manière éparse, et un Marco réduit à un simple guest en tant que vocaliste. Le groupe était pour moi quasiment en phase terminale. C'était donc avec zéro hype que j'attendais ce "Yesterwynde", Nightwish ayant de toute manière été largement surpassé par d'autres groupes du style comme "Ad Infinitum" ces dernières années. Mais vous savez ce qu'on dit ? Quand on n'a aucune attente, on ne peut pas être déçu ?

 

Et pourtant.... Après 4 ans, j'ai fini par réécouter "Human II Nature" et sans le trouver transcendant (à vrai dire je le classe avant dernier de tous leurs albums, juste devant "Angels Fall First"), la déception étant passé, je le trouve nettement plus audible avec le recul, au point que je lui remonterais la note si je le chroniquais aujourd'hui. Du coup, je donne sans problème sa chance à ce nouvel opus. Mais rien à faire, malgré toute ma bonne volonté, je n'apprécie pas vraiment "Yesterwynde". On en reparlera dans 4 ans, peut être qu'il passera mieux ? Mais pour le moment, décryptons ce qui ne passe pas ici pour moi.

 

Déjà, je n'adhère pas à la présence de Troy Donockley au sein du groupe. Si en simple guest sur quelques morceaux, il ne me dérangerait absolument pas, en tant que membre permanent, Nightwish s'en retrouve trop adouci et manque de patate. Ensuite, si je suis quelque peu rassuré par le retour des orchestrations, l'inspiration n'est plus là. Le côté mash-up d'anciens titres passait déjà difficilement en 2015, mais aujourd'hui c'est rédhibitoire. Alors oui, encore une fois, de temps à autre je me retrouvais à kiffer, certains morceaux me plaisent, sans être ce qu'ils ont fait de mieux. "The Antykhera Mechanism" est bien heavy (et sympa la ref à Indy 5), "Perfume of the Timeless" a un chouette refrain, "An Ocean of Strange Islands" est épique comme il faut et "Sway" met ENFIN en valeur les voix.

 

Niveau textes, Tuomas a été particulièrement inspiré et une fois encore, on doit reconnaître que c'est un fantastique parolier et que de ce côté là il écrase 95% des paroliers de metal. Mais alors Jamy, du coup qu'est-ce qui va pas ? Ca a l'air plutôt bon tout ce que tu nous dit là ? Et bien le soucis encore une fois, semble être le laisser aller de Tuomas, un album qui transpire la lassitude. Tous les éléments Nightwishiens sont présents (à l'exception de Marco qui manque cruellement), mais quelque chose ne prend pas, comme un disque fait sans passion, sans trop y croire, juste parce qu'il faut faire un album. La voix de Floor, qui encore une fois est trop peu exploitée (mais bordel, elle peut chanter genre 5 styles différents, exploite ça Tuomas !!) dans ses capacités est, et c'est encore pire, parfois sous mixée ! Le premier extrait "Perfume of the Timeless", malgré ses qualités de composition est représentatif de ce problème de mix. L'album mériterait un remaster, c'est indigne, sa voix est comme étouffée.

 

"Yesterwynde" est encore une fois une déception de la part de Nightwish. Il sonne comme le testament d'un groupe qui n'arrive plus à être uni face à son leader génial mais torturé, qui semble ingérable humainement. Floor semble être désincarnée, chantant certes très bien mais on dirait qu'elle se contente juste d'appliquer une consigne, comme une actrice récitant très bien son texte. Les compos sont pour la plupart très bonnes, c'est bien joué, mais quelque chose ne fonctionne plus et le mixage laisse à désirer. Un peu comme si le groupe s'était forcé à nous livrer un nouvel album "parce qu'il le faut", mais qu'il n'y croyait plus. Si j'adhère toujours autant à leurs anciens disques, celui ci risque bien de prendre la poussière sur mon étagère. On croise maintenant les doigts pour qu'une future écoute puisse au moins partiellement le réhabiliter. Cela dit soyons clairs, c'est parce que j' adorais le groupe que je suis si dur, et si le même CD sortait de la part d'un autre groupe, je serais autrement plus indulgent. Ce dixième opus n'est pas une horreur non plus, reste tout à fait audible, avec ses moments de bravoure, et je le classe au dessus de "Human II Nature" malgré tout !