Aephanemer - Utopie

Originaire de Toulouse, Aephanemer — mot-valise formé à partir de fané et éphémère — débute en 2013 comme le projet solo du guitariste Martin Hamiche. En 2014, il sort l’E.P "Know Thyself" avant de recruter d’autres membres pour donner naissance à un véritable groupe : Marion Bascoul (chant et guitare rythmique) et Mickaël Bonnevialle (batterie).

 

Le premier album, "Memento Mori", paraît en 2016, suivi de "Prokopton" en 2019, puis de "A Dream of Wilderness" en 2021, cette fois chez Napalm Records. Groupe de melodic death metal à forte influence orchestrale, Aephanemer s’inspire principalement de la scène nordique (Septicflesh, Fleshgod Apocalypse), tout en revendiquant une identité francophone affirmée. Le chant en français, rare dans le genre, évoque par moments Misanthrope, tandis que les riffs rapides, les orchestrations majestueuses et les mélodies épiques se mêlent à une dimension lyrique et philosophique.

 

Le morceau "La Règle du Jeu" frappe fort dans ce registre : tempo effréné, riffs mordants, growls impétueux de Marion Bascoul, et arrangements orchestraux qui élèvent l’ensemble. Le groupe le décrit comme « l’un des titres les plus énergiques et entraînants de l’album », et je suis d’accord : c’est une véritable carte de visite de ce qu’Utopie veut proposer. À l’inverse, "Le Cimetière Marin" démontre la capacité du groupe à explorer un versant plus introspectif. Inspiré d'un poème de Paul Valéry, le morceau déploie ses riffs majestueux et ses nappes orchestrales pour instiller une sensation d’espace et de temps suspendu. Puis vient "Contrepoint", qui offre un autre angle : ultra-polyphonique, presque baroque, où chaque écoute révèle de nouveaux détails. Le groupe le présente d’ailleurs comme « le plus polyphonique » de l’album, et c’est un qualificatif bien mérité. 

 

La production, ample et précise, est à la hauteur de l’ambition. L’identité du groupe s’affirme avec une vraie cohérence, malgré la variété des morceaux. On passe de titres rapides et furieux (comme Vin Diesel) à d’autres plus atmosphériques et conceptuels. Le concept d’ensemble, centré sur l’utopie comme confrontation plutôt que fuite, apporte une profondeur supplémentaire.

 

Cependant, cette richesse et cette densité peuvent rendre l’album moins immédiat : "Utopie" demande du temps, de l’attention, et surtout de la disponibilité émotionnelle. Je recommanderais donc "Utopie" à quiconque apprécie un metal mélodique exigeant, riche et immersif, qui cherche autant l’émotion que la virtuosité.

 

Si vous préférez le riff frontal, le chant anglais ou la simplicité brute, vous y trouverez peut-être moins votre compte. Mais si vous êtes prêt à vous abandonner à sa proposition et à plonger dans ses textes, alors cet album mérite toute votre attention.