Event Horizon - Le Vaisseau De L'Au-Dela
Notons cette chronique, car elle sera unique en son genre. Elle sera la seule à défendre Paul W. S. Anderson le temps d'un film, son premier et remarquable essai dans le monde du fantastique horreur, puisqu'il est tout simplement un des meilleurs films de genre des années 90. Si la concurrence donnait surtout dans le nanar (Virus, Chucky 4...), ce film développe des inspiration Clive Barkerienne qui font froid dans le dos, et qui concurrencent directement Alien en termes de terreur spatiale.
Son postulat, naturellement alléchant, est constamment entretenu par un savant sens de la suggestion. Si l'introduction s'impose un rythme artificiel (le départ est trop précipité, mais ce n'est pas grave, on sera mis dans le bain peu après), la situation initiale commence vraiment après 10 minutes de films. Après une excellente représentation d'une théorie scientifique (j'insiste, c'est rare de voir des sciences bien expliquées, et l'exemple symbolique du trou noir est très bien choisi), le film entretient le mystère par un simple message radio passant en boucle (on reconnaît le côté Alien, sauf qu'ici, l'effet est autrement plus terrifiant). Puis il joue à fond sur la carte de l'inconnu, laissant entrevoir de multiples petites anomalies ça et là dans le vaisseau (des formes de vies impossibles à localiser, le chauffage éteint, la disparition de l'équipage...) jusqu'à ce que le fameux trou noir du film soit localisé et n'happe l'un de nos personnages. A partir de là, tout se dérègle, et nos héros, contraints de rester sur l'Event Horizon suite à la dégradation de leur vaisseau, commencent à noter beaucoup d’événements bizarres. Ces derniers apparaissent essentiellement par des hallucinations vénères, intrusives, qui s'aventurent bien loin de l'horreur organique de Ridley Scott. La terreur d'Event Horizon n'est pas incarnée, du moins pas de façon visible. Elle est essentiellement psychologique pour commencer (les nerfs cèdent devant des visions d'horreur avides en soubresaut), et se précise au fur et à mesure qu'une présence semble investir le vaisseau et tente de posséder plusieurs personnes. La menace en question, on se gardera bien de la dévoiler, celle-ci faisant tout le sel du film et lui donnant un goût d'inédit. Car quand tout commence à partir de travers, qui pourra se douter du final ?
En termes de casting, le film est efficace, misant sur un Laurence Fishburne pré-Morpheus et Kathleen Quilan en astronautes terrifiés. Mais l'atout charme du film est indéniablement Sam Neill. Jouant à merveille le scientifique au lourd passé, il est pour beaucoup dans l'ambiance Barkerienne du film. Jouant un personnage torturé fasciné par sa propre création, Sam Neill livre une composition assez nerveuse, qui n'hésite pas à se lancer dans de brèves incursions gores qui contribueront grandement à densifier l'intrigue d'un dernier acte désespéré (qui nous balancera, un peu trop vite, des visions dignes d'Hellraiser). De quoi oublier l'ignoble side kick noir qui nous fait du LL Cool J in the space. Véritable pépite de l'horreur spatiale, Event Horizon est une série B de bonne tenue, qui crée son univers sans empiéter sur celui des autres et qui montre définitivement que Paul W. S. Anderson avait un grand potentiel, à ses débuts...
En guise de maestro de l'horreur, il reste un producteur parfois avisé (le sympathique Pandorum) et un tâcheron promoteur de Milla Jovovich...