The Strangers
Dire que le cinéma sud-coréen fait partie des meilleurs serait un euphémisme. Rien que cette année, nous avions déjà loué des productions de ce pays, que ce soit le fameux Dernier Train Pour Busan ou, lors de nos retours sur le BIFFF, le somptueux Memories Of The Sword. Mais 2016 nous a envoyé dans nos contrées une autre pépite sud-coréenne dénommée The Strangers.
Quand la petite ville de Gok-Seong (titre original du film, d'ailleurs) est affectée par des meurtres macabres, c'est au policier Jong-Gu de démêler l'affaire. Mais cet homme trouillard saura-t-il rester impassible quand sa propre famille va se voir affectée par un mal qui aurait été propagé par un mystérieux ermite japonais ?
2 heures et 36 minutes. Voilà la durée de The Strangers. Si cela pourrait en rebuter plus d'un, les plus courageux ne pourront que constater que rien n'est futile dans ce récit. La densité de l'intrigue fait partie de ses plus grands avantages. L'histoire se permet de nombreuses pistes, aussi bien rationnelles que fantastiques, et une fois que l'on se laisse pêcher par le réalisateur, il est difficile de se détacher de son film.
Un autre point fort vient des interprètes, en particulier Kwak Do-Won en Jong-Gu, Kim Hwan-Hee dans le rôle de sa fille et Jun Kunimura en japonais attirant les regards méfiants. L'intérêt d'un personnage comme Jong-Gu est son humanité, bien éloigné des standards hollywoodiens de l'héroïsme. C'est d'ailleurs bien ce dernier mot qui lui collerait le moins tant il est froussard et penche vers les mauvais choix. Et pourtant, il est bien courageux de nous attacher à un tel caractère, sincère et prenant des directions malheureuses pour le bien-être de sa famille.
ATTENTION SPOILERS ! ATTENTION SPOILERS ! ATTENTION SPOILERS !
Une autre chose qui frappe dans The Strangers est la forme que prend le mal. Bien qu'il s'avérera au final surnaturel, c'est son arrivée par un facteur humain qui le rend si effrayant. C'est en effet une construction physique de la peur d'autrui qui pousse le récit à une forme assez sombre et quasiment nihiliste, rappelant sans le citer L'Exorciste. Outre des scènes d'exorcisme, Na Hong-Jin partage avec l'œuvre de William Friedkin une réflexion théologique poussée (on sent d'ailleurs le travail du réalisateur qui a pris son temps pour tourner son film afin de le créer le mieux informé possible). Il est aussi malheureux de constater la véracité de cette peur d'autrui dans notre actualité récente (les accidents racistes qui augmentent aux États-Unis en ce moment, les nombreux dérapages verbaux devenus quotidiens sur les réseaux sociaux). Au lieu que d'appeler directement à l'union, Hong-Jin se permet de montrer les répercussions d'un tel rejet souvent plus provoqué par un manque de perspicacité que par une pure volonté de racisme.
FIN DES SPOILERS !
The Strangers confirme au final tout le bien que l'on pensait du cinéma sud-coréen. De quoi influencer nos œuvres à plus gros budget, pour obtenir un travail de personnages plus poussés par exemple ? Il y a de quoi espérer...