Evil Dead 3 - L'Armée des Ténèbres
Avec Evil Dead - L'Armée des Ténèbres Sam Raim décoit. Et pourquoi ? Parce qu’il aseptise l’excellent mélange qu’il avait réussi à créer dans son troisième épisode : à savoir de l’horreur efficace mâtinée de gore qui tâche, et comédie mâtinée de gore qui salit. Et dans ce nouvel opus… Ben y a plus de gore ni d’horreur. Plus rien que de la comédie et un peu d’aventure. Un sacrifié aux démons qui meurt dans un geyser de sang de plusieurs mètres, c’est clairement de la comédie volontaire. Bref, après un court remake du 2, particulièrement aseptisé (pas la moindre éclaboussure là où on pourrait faire une thèse sur la gestion des fluides chez Raimi), on retrouve notre héros pieds et poings liés par des chevaliers. Sympa, on va suivre l’émergence d’un héros. Le souci, c’est que le film n’a pas le budget de ses ambitions. Si seulement quelques plans craignaient dans le 2, il y en a ici des dizaines, à commencer par ce château affreusement incrusté, et puant le carton plâtre pour les décors intérieurs.
Au moins, reconnaissons au film qu’il est bancal, et que par moments c’est très plaisant. On rit à l’idée que des personnes craignent des démons et en gardent dans leur sous sol pour s’amuser avec les prisonniers. Mais l’occasion de voir un combat épique, tronçonneuse au poing, Ash is back, et il a maintenant l’étoffe d’un combattant (ce qu’il n’était pas dans le premier, et qu’il devenait au cours d’une scène purement bricolage dans le second). Il arrive et impose sa loi, un moment particulièrement drôle du film, jubilatoire, mais ignorant totalement toute notion de retenue ? Ash a encore du chemin à faire avant de devenir un héros, agissant comme un profiteur tant qu’il possède la force physique. La VF ne mâche d’ailleurs pas ses mots, traitant avec familiarité tous les personnages du film, sortant de l’argot dans presque toutes les répliques de Ash.
Cette absence de distance, de mesure, nuit un peu au projet, qui n’a alors plus rien de sérieux et qui prend peu à peu des allures de trip à la Naheulbeuk, en sortant des vannes qui sortent d’un tonneau peu éloigné de cette saga mp3 à la Française. Un humour plutôt simple donc (le choix des trois bouquins), et jamais vraiment mâture. On notera cependant l’apparition d’une thématique chère à Raimi : le pire ennemi du héros, c’est lui-même. Une thématique qu’il abordera légèrement dans Darkman, et plus largement dans Spiderman 3). On a donc la naissance d’un double maléfique au cours d’une séquence siamoise plutôt amusante car improbable, qui refuse toujours de montrer un peu de gore (même les têtes coupées sont aseptisées). Si le jubilatoire ne rachète pas tout, le film se montre quand même très généreux en matière d’ingrédients sympathiques. Pas moins de 2 séquences bricolages hautement jouissives (la refabrication d’une main, très improbable, et la préparation au siège du château). On aura droit à une armée des morts bien fournie, même si on devine un nombre de figurant limité (on en recroisera plusieurs au cours de la grande scène de combat). Les squelettes sont d’ailleurs personnifiés d’une manière peu subtile, la VF leur octroyant des voies aiguës qui recherchent constamment les jeux de mots ou expressions rigolotes.
Au final, le manque de sérieux du projet nuit un peu au spectacle malgré des chorégraphies très ludiques dans la bataille du château. Malgré un épilogue parfaitement dans le ton et efficace (mort de rire et gentiment iconique, Ash mitraillant en passant devant le drapeau américain), on ressort du projet amusé, mais pas vraiment convaincant, le film ne tentant jamais de faire de l’héroïc fantasy sérieuse, un genre d’autant plus respectable qu’il est rare d’en croiser avec une bonne trempe (à part Conan, un titre vous vient à l’esprit ?). Un film amusant, mais qui est loin d’être la conclusion qu’on attendait après le second.