The Haunting Of House Hill
Bien qu'il s'agisse officiellement d'une adaptation du roman éponyme de Shirley Jackson publié en 1959 et déjà adapté une première fois par Robert Wise en 1963 sous le titre The Haunting (La Maison du Diable en VF) et une seconde fois en 1999 par Jan De Bont (Hantise, avec Catherine Zeta-Jones et Liam Neeson), The Haunting of Hill House, la nouvelle série de Netflix est une oeuvre autonome, n'ayant qu'un vague rapport avec l'oeuvre de base. En effet, cette série complète (à moins d'envisager un format à la American Horror Story ou Slasher, il n'y aura vraisemblablement pas de saison 2) entièrement réalisée par Mike Flanagan (Oculus, Before I Wake, Jessy, Ouija - Origins, Doctor Sleep) est une toute nouvelle inspire qui ne fait que reprendre des éléments du roman et du film original (aucun du remake toutefois, mais également de son film rival des 50's : House on Haunted Hill (La Nuit des Mystères, avec Vincent Price), également remakée en 1999, en tant que film concurrent de Hantise : La Maison de l'Horreur. Flanagan joue ainsi totalement sur le fait que le titre de la série est un mix entre ces deux oeuvres : The Haunting + House on Haunted Hill = The Haunting of Hill House !
Passé cette singularité qui lui donne le loisir de piocher dans les divers classiques du genre, Flanagan, qui mine de rien est en train de concurrencer de plus en plus James Wan au titre de nouveau "Master of Horror" a réalisé un petit bijou de fantastique suggestif, jouant d'avantage sur la suggestion et l'effroi que sur l'horreur pure. Sa série est intense, lourde de sens et d'interprétations et peut également être vue comme un drame psychologique. A l'instar de son brillant Before I Wake. Il reprend également deux des acteurs principaux de son précédent film Jessy : la superbe Carla Cugino et l'ancien Elliott d'E.T. , Henry Thomas. L'intrigue parle de leur couple et de leurs cinq enfants, qui emménagent dans une splendide vieille villa, évidemment hantée. La série commence alors que le père oblige les enfants à quitter la maison, laissant la mère à l'intérieur, sans trop qu'on ne sache pourquoi puis reprend 26 ans plus tard. Les enfants ont grandi et ont tous souffert de ne pas savoir ce qui est arrivé exactement à leur mère, décédée cette nuit là, et ne parlent plus à leur père.
Chaque épisode (enfin 7 sur les 10) a alors la brillante idée de se focaliser sur le point de vue et le ressenti d'un seul des 7 personnages principaux. On découvre alors son présent, son rapport à la fameuse nuit, comment il ou elle l'a vécu. Et chacun de ces épisodes nous présente différentes scènes, à première vue anecdotiques, ou peu compréhensibles, mais qui fait sens une fois que l'on a vu le point de vue d'un autre protagoniste ! En effet, la série nous perd volontairement durant ses deux premiers épisodes, pour mieux nous surprendre par la suite. On n'est pas loin d'un Lost version maison hantée, à la différence près que le début a été écrit en ayant connaissance de la fin. Pas de "freestyle" dans l'écriture de la série donc, chaque scène a son importance, tout a sa résolution claire... Et logique ! On est donc très loin d'American Horror Story - Murder House sur le même thème qui partait dans tous les sens et n'en avait finalement aucun (de sens). Ici il n'y a pas 15 000 coïncidences qui arrivent sans raison particulières toutes dans la même maison et à des gens qui se connaissent. Tout est lié. Tout a une raison d'être.
Que Mike Flanagan ait réalisé l'ensemble des épisodes donne une cohérence inédite à l'ensemble, on est réellement dans un très long film de 10 heures. On retrouve le côté poétique de sa filmographie et son études de personnages intéressants. Ce qui fait souvent cruellement défaut dans les films d'horreur. Le format série étant ici exploitée au mieux. Chaque personnage, y compris le plus détestable se montrera touchant à un moment ou à un autre. Le fantastique étant comme dans les grands classiques littéraires (Edgard Allan Poe, Oscar Wilde...) révélateur d'une certaine réalité. Comme chez Guillermo Del Toro, on peut tout à fait visionner l'oeuvre comme une métaphore filée, d'une famille disfonctionnelle. Une allégorie des changements inévitables de la vie, de ses conséquences inéluctables, de la manière dont nous gérons les situations déplaisantes... Et leur acceptation !
Si vous regarder cette série dans le but d'avoir peur, vous pourriez être déçu. S'il y a des moments d'angoisse, ce n'est pas forcément le but premier. Si vous voulez du gore, changez de série totalement. Le bestiaire fantastique y est assez réduit, mais chaque apparition a sa signification précise. La maison et surtout la fameuse "pièce rouge", fil conducteur du mystère du show, sont des personnages à part entière. Si vous voulez en revanche regarder une série avec une bonne histoire, qui véhicule des émotions, tout en tenant en haleine avec un énorme sens du suspens et au moins 2 twists à la M. Night Shyamalan, là vous avez touché le gros lot ! The Haunting of Hill House pourrait bien être la série idéale pour Halloween. Et Flanagan continue de confirmer tout le bien qu'on pensait de lui.